Papa ◘ « On part à Ipswith »
Moi ◘ « Quoi ?! Papa, nan on ne peut pas. Je ne veux pas. »
Papa ◘ « J’ai un poste là bas, et j’aimerai que tu nous suives pour Danny au moins, ma chérie. »
Moi ◘ « A une seule condition, Thomas vient avec nous. Je l’aime vraiment, et je ne veux pas le perdre par un déménagement, sinon je reste en Californie. »

Du haut de mes 20 ans, cette discussion avec mon père promettait d’être longue, je savais comment c’était. Mais pourquoi quitter San Diego ? J’étais persuadée que c’était par la faute de ma mère, quitter San Diego était le bon côté pour recommencer quelque chose, 17 ans plus tard, 17 ans déjà. Je montais dans ma chambre après cette belle discussion aussi courte fut-elle, m’allongeant sur mon lit, en jetant un coup d’œil à mon mobile. Aussi étrange soit-il, je me souvenais parfaitement de quand ma mère était décédée. Même en étant petite, il y a des moments qu’on retient toute sa vie. Ma chambre, le grand lit sur lequel j’étais allongée, je regardais ce plafond blanc. Je regardais une nouvelle fois, mon mobile. 2 :05 p. m . J’avais l’impression que le temps se déroulait de plus en plus lentement. Je devais voir Thomas encore aujourd’hui. Dans deux heures encore. Mon frère ne devrait pas tarder à rentrer, en ce samedi du mois janvier. J’avais déjà entendu la porte claquait une fois, cela devait être mon père, partit au travail, pour une urgence ? Il devait être en congé ? Et si cette nouvelle ville pouvait nous changer, changer notre train de vie, le rendre plus agréable, pour Danny, pour moi, pour Papa. Pour Thomas aussi… J’espérais qu’il vienne avec nous, il était mon tout, il était l’homme de ma vie, je l’aimais au-delà de mes espérances. Comme un courant d’air vint me caresser les joues, je remarquais que ma fenêtre était toujours ouverte.

Le fait de déménager pouvait nous permettre de reprendre un nouveau départ, pensais-je tout en fermant ma fenêtre. Peut être que la présence de mon père loin de ma mère serait plus quotidienne. Le seul souci, je ne pourrais plus passer dire bonjour à ma mère. Oui, peut être étais-je folle de parler à une tombe. Mais j’étais persuadée que de là où elle était, elle m’entendait, ma petite maman. C’était mon petit secret, personne ne pouvait savoir qu’après certains jours de cours, je me rendais au cimetière pour rendre visite à ma mère. Après tout, j’en avais besoin, même si au final, je ne me souvenais pas beaucoup d’elle. Décédée quand j’avais à peine 3 ans, en 1991. Je me souvenais parfaitement par contre de comment on me l’avait annoncé. Pour la simple et bonne raison, que mon père est revenu en larme à la maison avec mon frère dans les bras. Et je lui ai demandé « Papa pourquoi tu pleures ? Regarde j’ai un petit frère, tu devrais être heureux ? » avec une petite voix d’enfant. Lui m’avait simplement dit « Oui, ma puce, tu as un magnifique petit frère. » Puis j’avais posé la question fatidique « Où elle est maman ? Toujours à l’hôpital ? ». Il m’avait pris sur ses genoux, en me disant que maman ne rentrerait pas, et qu’elle ne serait plus jamais avec nous, parce qu’elle était montée dans les nuages tout là haut. J’avais pleuré, beaucoup. J’en avais aussi voulu à mon petit frère pendant les premiers jours, puis la colère était passée, j’étais redevenue une enfant, triste certes, mais je m’occupais de mon petit frère comme une véritable poupée. Mon père lui était souvent absent, et j’avais pris l’habitude de passer beaucoup de temps avec mes cousins, même encore aujourd’hui à 20 ans. Tout cela me manquerait, la chaleur de San Diego, mes cousins, les repas et les fêtes en famille.

Soudain j’entendis la porte claquée une seconde fois, je me levais pour voir, en passant la tête par la Messaline.

Moi ◘ « Danny ? C’est toi frérot ? »